

De nombreuses transformations sont en cours, et le numérique est la vraie solution pour accompagner ces transformations. Si la technologie a des effets positifs, elle a aussi des effets négatifs et la prise de conscience de l’empreinte environnementale du numérique devient collective.
« Une vision holistique des effets du numérique se dessine : le numérique est à la croisée des chemins et à la croisée des transitions »
Véronique Torner, Planet Tech Care
La part du numérique dans les émissions mondiales de CO2 est passée de 2,9 % en 2013 à 3,5% en 2019 (1,84 Gt). La croissance de ses impacts est de + 6 %/an, incompatible avec la trajectoire 2°C en 2030 d’après The Shift Project, think tank qui œuvre en faveur d’une économie post-carbone.
D’après ses analyses, ce taux de croissance correspond à un doublement en 11 ans et est appelé à augmenter dans tous les scénarios n’intégrant pas un changement volontariste dans les pratiques de consommation (trafic, terminaux).
La part du numérique dans les émissions de gaz à effet de serre (GES) va continuer à augmenter et pourrait doubler d’ici 2025 pour dépasser 7 % : un chiffre qui augmentera encore si nous ne choisissons pas d’agir.
Quelles sont les composantes de l'empreinte carbone du numérique ?
La phase de production des équipements prend donc une part significative dans l’empreinte carbone totale du numérique et dans le cycle de vie des objets numériques (production-usages-fin de vie). Aujourd’hui, seuls 20 % de l'ensemble des produits numériques sont recyclés.
Schéma Figure 3 : Distribution de l’empreinte carbone du numérique mondial par poste en 2019 (The Shift Project – Forecast Model 2021)
L’exemple du smartphone : la consommation d’énergie pour un smartphone est de 90 % pour sa production contre 10 % pour son utilisation !
La croissance de la consommation énergétique du numérique peut être attribuée principalement à :
- Des besoins de traitement et de transport de données non absorbés par le progrès technologique,
- L’explosion du trafic de données mobiles,
- La demande en capacités de calcul (IA, crypto-monnaies),
- L’edge computing
Avec en fil rouge, « l’effet rebond » , difficile à mesurer. L’effet rebond est un concept qui met en avant le paradoxe réel entre la hausse des économies d’énergies ou de ressources pour produire quelque chose (ce qui est plus « green »), économies annulées parce que cela va avoir pour conséquence de faire exploser la demande des consommateurs pour ce produit (beaucoup moins « green » !). D’après William Stanley Jevons, créateur de ce concept, : « plus les améliorations technologiques augmentent l’efficacité avec laquelle une ressource est employée, plus la consommation totale de cette ressource aura tendance à augmenter, au lieu de diminuer » (source : Green IT).
Ainsi, l’effet rebond est au cœur par exemple des débats sur la 5G
( Note d’analyse – Impact environnemental du numérique : tendances à 5 ans et gouvernance de la 5G 21 selon les données synthétiques issues du Référentiel Environnemental du Numérique (The Shift Project, 2018)
Cette tendance à l’accroissement de la consommation va se renforcer en raison de l’équipement progressif des pays en développement mais aussi par des usages liés à nos modes de vie : vidéo en K4, réalité virtuelle (VR) bientôt possibles avec la 5G, par l’augmentation du débit de données accessibles sur les mobiles.
Plus nous créons de données, plus nous consommons d'énergie et plus nous contribuons à l'accélération du changement climatique...
Comme l’a dit Véronique Torner lors du webinaire « Green IT : quel est le vrai impact du numérique sur l’environnement ? » organisé par Bpifrance Le Hub le 18 février 2021, le numérique est à la fois potion et poison. Face à ces nouvelles pratiques énergivores en termes d’impact, de nouveaux usages ont néanmoins une valeur ajoutée sociétale. Nous avons tous en tête les gains apportés par le numérique :
Par exemple, dans le cas de l’organisation d’un évènement, si l’on compare le virtuel et le réel : une visio-conférence pour se connecter est égale à un mégaoctet de débit pour 1h par rapport à un déplacement de 200 personnes en voiture/trains. La visio-conférence a moins d'impact énergétique et le numérique est moins coûteux pour l'environnement dans ce cas.
La pression économique relative au coût de l’énergie s’intensifie, comme le Mooc Numérique Responsable le décrit. Rendre le numérique responsable peut-être une opportunité pour les entreprises : optimiser un service numérique leur permet de réduire les coûts d’énergie tout au long du cycle de vie. Et comme l’a mentionné Thierry Zeller dans le webinaire de BPI France, ces entreprises qui deviendront plus performantes demain, plus compétitives auront aussi une attractivité plus grande…
Si les entreprises sont volontaires pour agir, demeure néanmoins une difficulté : les méthodologies pour mesurer l’empreinte environnementale du numérique restent en construction.
APL Data Center revient sur les évolutions légales relatives au numérique responsable de 2020 :
Au 1er janvier 2022, les mesures suivantes entreront également en vigueur :
La prise de conscience politique est donc réelle et doit se poursuivre pour renforcer l’incitation des entreprises à limiter leur impact environnemental dû au numérique.
En parallèle, un exercice de sensibilisation auprès du grand public est également nécessaire pour que chacun en saisisse les enjeux et sache comment limiter son impact au quotidien ! Pour cela, La Fresque du Numérique est un excellent moyen, ludique, d’en découvrir les coulisses et de se sensibiliser au cours d’un atelier en ligne collaboratif. L’ADEME a également produit un petit guide pratique informatif, « La face cachée du numérique - Réduire les impacts du numérique sur l’environnement ».
Pour conclure, en abordant la partie environnementale du numérique, nous prenons conscience des enjeux multiples de nos choix technologiques et des autres facettes du numérique responsable : éthique, gouvernance… Cela fera l’objet de prochains articles. A suivre !
Pour aller plus loin :